La Lune brillait dehors, d'une lueur douce qui éclairait légèrement la pouponnière. C'est l'heure. Etoile Embrasée m'attend, aux Rochers du Soleil. Doucement, je me lève en essayant de ne pas réveiller les chatons et les reines qui dorment juste à côté de moi. Je sors discrètement et jette un coup d’œil au garde qui m'a l'air plutôt inattentif. Avant de partir retrouver mon Amour, je me glisse dans la tanière de Fleur Nocturne, ma chère Fleur Nocturne. Etant la guérisseuse du Clan et ma confidente, elle sait qui est le père des petits que je porte et qu'ils risquent de naître très bientôt. D'un petit coup de patte, je la réveille et lui souris malicieusement, ce qui en ce moment est de plus en plus rare.

« Je vais rejoindre Etoile Embrasée, aux Rochers du Soleil. Tu viens avec moi ? »

Je m'assois, en attendant qu'elle se réveille totalement. Je laisse mon esprit vagabonder : je pense à mon fier guerrier aux yeux de braises, qui est sans doute impatient de me revoir. Je lâche un soupir et met le nez dehors. L'air est frais mais c'est agréable par rapport à la chaleur de la pouponnière.

Sans attendre Fleur Nocturne, je sors du camp, l'air sérieux, en saluant le garde qui ne bronche même pas. Je trottine, le nez en l'air, admirant les couleurs de la forêt lors de la saison des feuilles mortes. Je sens alors un flocon de neige qui tombe sur mon nez. Je fronce le museau et souris, retrouvant un court instant mon innocence de chatonne.

Je continue d'avancer, plus lentement cette fois. Soudain, une douleur intense me traverse. Je lâche un cri de douleur. J'ai vu plusieurs femelles qui avaient des contractions et qui mettaient bas à peine quelques minutes après. Je serre les dents et me remet en marche, malgré les contactions.

Enfin, j'entends les clapotis de la rivière. J'accélère et m'effondre près du premier rocher que je rencontre. En haletant, j'inspire profondément, pendant qu'une nouvelle contraction me déchire de l'intérieur. Le cœur battant, je pris de tout mon cœur le Clan des Etoiles pour que Fleur Nocturne arrive rapidement. Très rapidement. Je lève la tête en sentant l'odeur de Etoile Embrasée. Je lui souris, bien que je sois crispée.

« Bizarrement, je pense que tu vas bientôt être papa, je ne sais pas pourquoi ... »

Avec une grimace, je me redresse et jette un coup d’œil vers l'endroit où la guérisseuse devrait arriver. Je me félicite intérieurement de l'avoir tiré du lit. Une nouvelle contraction vient me tordre les entrailles. Maintenant que je suis sur le point de mettre bas, je commence à comprendre ce que voulaient dire les reines quand elles parlaient de la naissance de leurs chatons.

« Est ce que tu peux allez jeter un coup d'oeil là bas, histoire de voir si Fleur Nocturne est perdue dans la forêt ? »

Dehors la lune brille d'un bel éclat argenté et les étoiles viennent scintiller à ses côtés.
Mes côtes se soulèvent à un rythme régulier, plongée dans mon sommeil, je n'entends pas des bruits de pas arriver. Une patte me touche délicatement mon flanc. J'ouvre les yeux et les cligne quelques instant. Devant moi se tient Liberté Féerique, son regard est éperdument amour et dans ses yeux on peu y lire sa joie.

« Je vais rejoindre Etoile Embrasée, aux Rochers du Soleil. Tu viens avec moi ? »

Je baille avant d'hocher la tête d'haut en bas. Elle qui est assise se relève pour partir en direction des Rochers du Soleil. Je me lève et secoue mon pelage couvert de mousse, j'en profite pour prendre quelques plantes : des Feuilles de Framboise, des Feuilles de Bourrache ainsi que des Toiles d'Araignée au cas où une hémorragie se déclarerait. Il ne me manque plus qu'à trouver un bâton pour le mordre pendant son accouchement. Mais il faut que je me dépêche, le temps est compté à partir de ce moment même. Alors je m'élance à la sortie du camp, tenant fermement les plantes dans ma gueule. Alors que j'arrive vers l’itinéraire, un cri déchire le silence. Liberté Féerique !
Je double de vitesse mais une grosse masse noire apparaît devant moi. Je m'arrête net.

« Dépêche-toi ! La mise bas a déjà commencé ! »

Etoile Embrasée, le nouveau meneur du Clan de l'Ombre venait de me grogner ses paroles. Je me tasse sur moi-même, il ne perdra jamais une seconde pour me crier dessus, mais le voilà repartit. Je le suis et arrive à destination.

« Elle arrive, tout va bien se passer. »

Je pose tous ce qui avait dans ma gueule doucement et prend une branche d'arbre derrière un buisson. Je me dirige vers la reine qui est couché à côté de son bien-aimé. Je lâche le bâton devant son museau.

« Etoile Embrassée, je te conseille de te décaler, laisse-moi faire mon travail et puis ne t'inquiète pas, elle ne mourra pas. Liberté Féerique, n'hésite pas à mordre cette branche et quand je te le dirais, tu poussera de toutes tes forces. »

Je m'assois à côté de ma confidente et mets une patte sur son ventre.
La voir se tordre dans tous les sens avec ses contractions me procurent assez de peine et de pitié. Mais alors que je suis dans mes pensées, je sens une énorme contraction qui la secoue.
Mes yeux pétillent et je murmure.

« Maintenant ! »

« N-non, je ne peux pas te laisser seule ici ! »

Je continue de regarder Etoile Embrasée, qui après avoir hésité, détale dans les bois, en direction du camp. Je soupire et prends mon mal en patience, attendant qu'il revienne. J'avais hâte de voir nos chatons, même si je me doutais que je risquais de souffrir pour les voir. Perdue dans mes pensées, je suis ramenée à la réalité par une contraction plus forte que les précédentes, qui m'arrache un cri de douleur, que j'essaye de contenir.

Je ferme les yeux et inspire profondément, pour calmer les battements de mon cœur. Je sens un courant d'air et l'odeur musqué de mon Amour, qui vient s'allonger cotre moi, m'enveloppant de son étreinte chaleureuse. Je ronronne tandis qu'il me lèche le front. Je sens qu'il tremble légèrement, qu'il est inquiet. Je lui souris, et essaie de ne pas gémir en sentant une autre contraction qui me déchire de l’intérieur.

« Etoile Embrassée, je te conseille de te décaler, laisse-moi faire mon travail et puis ne t'inquiète pas, elle ne mourra pas. Liberté Féerique, n'hésite pas à mordre cette branche et quand je te le dirais, tu poussera de toutes tes forces. »

La voix calme et douce de Fleur Nocturne me rassure et j'acquiesce en attrapant le bâton entre mes crocs. Je ferme les yeux et me concentre sur les sensations qui assaillent mes sens. Une contraction secoue mon corps au moment où elle me hurle de pousser maintenant. Je pousse donc de toutes mes forces, jusqu'à m'en déchirer les tripe. Je sens soudain un petit paquet qui glisse. Je meurs d'envie de voir à quoi ressemble notre nouveau-né, qui commence déjà à téter allègrement.

« C'est un mâle ou une femelle ? »

J'ai à peine le temps de parler que je sens une nouvelle contraction. Je mords dans la branche ce qui me fait du bien. Je ne sais pas combien de chatons doivent naître, mais je prie le Clan des Etoiles pour qu'ils naissent rapidement. Je me tourne vers le petit ange qui est contre mon flanc et respire doucement. Je souris et lève les yeux vers Etoile Embrasée, avant de sentir une autre contraction, qui me fait tressaillir.


|Petite Arabesque est l'aînée, suivie de Petit Léopard, Petite Espérance et le petit dernier qui est mort-né|

Alors que je venais de souffler ces paroles, un chaton glisse sur le sol, un sourire s'esquisse sur mon museau, émerveillé de voir cette petite boule de poils gigoter dans tous les sens, Liberté Féerique posa la question que toutes le reines pose dès que le premier chaton arrive, je n'y répondis pas, trop préoccupé par la petite bête. Mais n'ai-je le temps de l'admirer encore que trois paquets tombent au sol un par un. Chacun s'empressent de les libérer de leurs poche pour ensuite les réchauffer en les léchant à rebrousse-poils.
Puis le meneur du Clan de l'Ombre s'approche à pas feutrés vers le dernier chaton pour l'emmener vers le corps chaud de sa mère.
Mais je le vois s'affoler. Qu'est-ce qui se passe ? Y a-t-il un problème ?
Le voilà qui essaye de se calmer, vainement.

« Dis moi qu'il va bien ! Tu, tu peux faire quelque chose hein ? C'est normal, il est sûrement endormi, mais j'ai beau le lécher il ne bouge pas ! »

Je me penche sur la petite bête pour la renifler et la toucher, il est froid et aucun souffle n'émane de lui. Je relève la tête l'air désolé en direction d'Etoile Embrasée, celui-ci qui quelques temps plus tôt cherchait de l'amusement dans mon regard va bien être triste à cette nouvelle.

« Je suis désolée, il est ... mort. »

Je prend le corps froid du bout de chou pour le ramener contre la mère pour qu'ils puissent leur dire en quelque sorte un "adieu". Je me retourne pour m'installer vers un arbre, le temps qu'ils puissent choisir ensemble les noms de leurs petiots.

Collée à l'arbre, je fixe les deux matous de mes yeux bleus. Tous les deux  couchés côte à côte avec la mine triste. Liberté Féerique discute avec son bien-aimé et montre du bout de sa queue un chaton.

« Je propose Petite Arabesque pour la première chatonne et ... Et, pour ... pour notre étoile, je ... j'aimerais bien l'appeler Petite Souvenir. Qu'en dis-tu ? »

La petite ressemble plus à sa mère que son père. Une fourrure crème avec des rayures de-ci, de-là. Le bouts des pattes blancs ainsi que son poitrail.

« Ça me convient.Ils sont magnifiques. Je voudrais appeler la noiraude Petite Espérance, et le mâle, Petit Léopard. Je suis sûr qu'elle sera aussi belle que toi et que Petit Léopard sera le guerrier le plus fort et le plus juste que la forêt aura connu. »

Entre temps, le meneur avait léché sa compagne et c'était rapproché d'elle.
La deuxième et dernière femelle a le même pelage que l'ombreux, mais la finesse de la reine. Quant au mâle, il a la forte carrure d'Etoile Embrassée.
Celui-ci a, à ce moment précis les larmes aux yeux et fixe sa portée avec un large sourire. Il murmure des paroles que je n'entendis pas.
Et dire, que ces chatons vont grandir loin de leur père, j'espère que cela ne se passera pas comme moi et qu'ils accepterons ce lourd secret. Mais je pense que leur mère fera tous son possible pour qu'ils respectent le choix de leurs parents et les aimer comme ferait n'importe quel chaton avec sa famille.
Je me lève de mon coin, pour les rejoindre.

« Il est temps d'y aller, sinon on va se douter de quelque chose au clan. »

Ma bien-aimée se frotta contre moi, et commença à ronronner doucement. Cela me berçait, me faisait oublier pleins de choses. Ce moment de bonheur inoubliable me faisait comme si le temps s'était arrêté, qu'on était dans notre bulle et qu'il ne se passait rien d'autre. Que moi et elle. Que notre belle famille. Il n'y avait que le présent. Je ne songeais pas à l'avenir ou au passé. Je voulais profiter de ce moment. Alors que j'admirai de mes yeux la portée de Liberté Féerique, je n'entendis pas la guérisseuse s'approcher.

« Il est temps d'y aller, sinon on va se douter de quelque chose au clan. »

Je m'écartai alors soudainement de ma compagne, et l'observai sur le côté prendre doucement Petit Léopard entre ses crocs. Elle le passa à Fleur Nocturne, tandis qu'il gigotait légèrement. La femelle prit ensuite les deux autres femelles, avant de se retourner vers moi. Ses yeux brillaient dans la pénombre, et je me doutais alors qu'elle mijotait quelque chose. Je restai silencieux, agitant ma queue touffue.

Elle fit alors quelques pas vers moi, avant de poser sa tête sur mon épaule. Mon regard dériva alors vers celle-ci, avant que je ne lui lèche le front tendrement. Nous allons à nouveau être séparé. Je n'avais pas envie de repartir. Toute ma douleur m'attend là-bas, alors qu'avec elle je me sens si bien, comme si elle me mettait toujours du baume au cœur. Si seulement je pouvais rester avec elle éternellement. Liberté Féerique me murmura alors :

«Je viendrais ici dans trois jours, avec nos petits. Je ne veux pas que tu sois séparé de tes enfants et qu'ils ne connaissent pas leur père. Je leur expliquerai que tu ne vis pas dans notre Clan, mais pas que tu es le chef du Clan de l'Ombre ou notre secret risque d'être découvert. »

J'acquiesçai d'un mouvement de la tête. Je n'avais jamais connu mes parents, et jamais reçu l'éducation du clan. Mais je suis sûr que le Clan du Tonnerre saura bien s'occuper d'eux. Puis ils auront toujours leur mère. Je fermai les yeux, savourant un peu plus la présence de Liberté Féerique. Elle me lécha dans le cou avant de se détourner, retrouvant Fleur Nocturne.

La guerrière me dépose le dénommé Petit Léopard pour que je puisse le prendre. Liberté Féerique prit ensuite les deux femelles pour ensuite se rapprocher du meneur du Clan de l'Ombre. Elle pose sa tête sur son épaule pour ensuite murmurer une phrase emplie de tendresse.

« Je viendrais ici dans trois jours, avec nos petits. Je ne veux pas que tu sois séparé de tes enfants et qu'ils ne connaissent pas leur père. Je leur expliquerai que tu ne vis pas dans notre Clan, mais pas que tu es le chef du Clan de l'Ombre ou notre secret risque d'être découvert. »

Le matou au pelage couleur jais acquiesce d'un hochement de tête. Les "tourtereaux" se lèchent mutuellement, ensuite mon amie se détourne et nous partons en direction du camp.
La silhouette du mâle disparaît peu à peu et l'envie d'avouer quelque chose me ronge. Mais je ne dis rien, malgré le fait qu'elle soit ma confidente. Je me contente de la regarder avant de continuer comme si de rien n'était.
Finalement, nous arrivons dans la clairière d'où émerge certains guerriers pour voir ce qui se trame et découvre tout bonnement des chatons. Des compliments sortent de toutes part et je rabats les oreilles.
Mais sans plus tarder je vais à la pouponnière pour déposer le chaton. J'attends que Liberté Féerique soit installé pour le coller contre son ventre.

« Si jamais tu as besoin de quoi que se soit, appelle-moi. »

Je fais volte-face et vais dans ma tanière.
Sur le chemin je croise Petite Etoile entrain de jouer avec papillon, dès que je passe, celle-ci s'arrête, me contemple, sourit et reprend enfin son activité. Je pousse un soupir et repars. Ne t'en fais pas Fleur Nocturne, c'est le seul choix que tu avais à faire.

HRP: